Une heure dans la friche : début mai

Ma première visite de la friche s'était déroulée par un ciel voilé et il en est de même un mois après. Début mai, on peut entendre dans les herbes quelques insectes difficiles à localiser alors que dans la forêt proche on remarque l'arrivée du Rossignol par son chant puissant.
Pour cette deuxième étude, j'ai demandé du renfort. Mon fils Théo, 10 ans en juin, m'accompagne avec son appareil photo. Habitué de ce genre d'expédition, il me sera d'une aide précieuse.

Plantes nourricières

Thécla de la ronce
Thécla de la ronce

Le décor a peu changé, en apparence, toujours la pelouse poussant sous les plantes mortes de la saison précédente. Parmi les herbes, plus hautes, les Barlies de Robert finissent leur floraison et sont remplacées par de nouvelles fleurs. On remarque des Ophrys de la passion associés aux Ophrys jaunes alors que le Thym et l'Euphorbe dentée sont les fleurs les plus visibles.

C'est donc naturellement vers les herbes et les nouvelles fleurs que nous espérons faire nos découvertes.
Dans les herbes, les sauterelles du mois précédent font maintenant 1,5 cm de long et ressemblent à des Decticelles. À ces individus s'ajoutent quelques jeunes sauterelles vertes mesurant environ 1 cm.

Mouche de la Saint Marc
Mouche de la Saint Marc

Nous nous approchons du Thym sur lequel butine, à côté des abeilles, un papillon de taille moyenne aux ailes vertes à l'extérieur et dont la principale décoration est formée de tirets blancs disposés le long d'une courbe. C'est le Thécla de la ronce dont les chenilles doivent manger les ronces ou les Argélas aux alentours. Sur d'autres pieds, un Bourdon passe.

Cétoine mortuaire
Cétoine mortuaire

Près de moi, Théo est penché sur une euphorbe où il a remarqué un insecte orange. C'est une mouche de la Saint Marc et plus précisément l'espèce Bibio hortulanus. Ces diptères sont ainsi appelés, car les larves qui vivent dans l'humus deviennent adultes aux alentours du 26 avril (St Marc). On trouvera sur l'euphorbe des femelles et des mâles qui eux sont entièrement noirs. Ils s'y nourrissent du liquide sécrété par les glandes nectarifères (petits coussinets vert-jaune en forme de croissant).
À mon tour, je trouve un nouvel insecte, une cétoine noire tachetée de blanc appelée Drap mortuaire. Ce scarabée vit, à l'état larvaire, dans les souches en décomposition.

Carnivores

Épeire des bois
Épeire des bois

Cette abondance de mangeurs d'herbes, de pollen et de nectar nous a rapidement mis sur la voie des carnivores. Ce mois-ci encore, le rôle de prédateur est largement rempli par les araignées que nous avons trouvées à tous les étages de la friche.

Hériée hirsute
Hériée hirsute

Sur les tiges mortes des plantes de la saison dernière étaient installées les toiles de deux espèces différentes posées toutes les deux dans un coin comme sur un petit coussin tissé. La forme, effilée aux deux pointes, de l'abdomen et un motif blanc rappelant le contour d'une feuille de chêne blanc permettent d'identifier l'Épeire des bois.

Un Thomise chargé et sa proie
Un Thomise chargé et sa proie

La seconde espèce à l'abdomen rond est une Épeire de velours Agalenatea redii. Les toiles de ces araignées portaient de nombreux restes d'insectes consommés, la chasse avait été fructueuse.

Dans les fleurs, nous avons trouvé un thomise chargé aspirant une mouche de la Saint Marc, alors qu'une grosse espèce d'araignée-crabe, peut-être Xysticus bufo , avait capturé une cétoine funeste (Drap mortuaire).

Araignée-crabe (Xysticus ?)
Araignée-crabe (Xysticus ?)

Plus bas, parmi les herbes, une troisième espèce d'araignée-crabe était postée. Son corps velu vert, ses longues pattes et une tache rouge sur l'abdomen ont permis d'identifier la Hériée hirsute (femelle, car l'abdomen était vert).

Enfin, en cherchant au niveau du sol, de nombreuses petites araignées-loups circulaient, sans doute des Pardosa, aucune photo ayant permis l'identification.

La friche nous montre une diversité croissante du fait de la métamorphose ou l'éclosion de nouvelles espèces. Les réseaux trophiques au fil des jours s'étoffent. Derrière son allure désordonnée, elle se révèle ce mois-ci comme un écosystème étagé où ses occupants herbivores et carnivores se répartissent l'espace. Chacun sa nourriture et chacun sa place.

L'heure est passée très vite, vivement juin !.

E. PENSA